L’enseignement supérieur dans un monde en mutation et plein de défis

20 Avril 2022

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©PoohFotoz/Shutterstock.com

Plus d’établissements, plus d’étudiants et plus de cursus à leur disposition : voici quelques-unes des évolutions qui ont marqué l’enseignement supérieur ces dernières décennies. La Conférence mondiale sur l’enseignement supérieur (WHEC), qui doit se tenir du 18 au 20 mai, mettra en avant les dernières tendances et défis du secteur en vue d’établir une feuille de route pour l’avenir. À cette occasion, nous revenons sur plusieurs grandes tendances observées depuis 1998, date de la première Conférence mondiale sur l’enseignement supérieur, puis dans les années qui ont suivi.

Ces 20 dernières années, l’enseignement supérieur s’est développé – et s’est transformé – à plus d’un titre. En 2020, il rassemblait 228 millions d’étudiants et étudiantes, contre 82 millions en 1995. Si le nombre d’étudiants a stagné ces dernières années dans les pays du Nord, les inscriptions dans les pays du Sud, qui représentaient à peine plus de la moitié des inscriptions mondiales en 2006, correspondaient en 2018 aux trois quarts de celles-ci.

Pourtant, en dépit de la croissance de l’enseignement supérieur, des inégalités de taille persistent dans le monde entier. Parmi les étudiantes et étudiants de 25 à 29 ans les plus pauvres, 1 % seulement parvient à achever quatre années d’études supérieures, contre 20 % des plus riches, d’après une enquête menée en 2017 dans 76 pays. La proportion des jeunes inscrits dans l’enseignement supérieur varie également, allant de moins de 10 % en Afrique subsaharienne à près de 80 % en Europe et en Amérique du Nord.

Nouvelles perspectives, nouveaux défis

La rapide progression des technologies de l’information et de la communication a elle aussi largement marqué de son empreinte les possibilités offertes par l’enseignement supérieur. Les avancées constantes des technologies numériques, des réseaux sociaux et des appareils mobiles facilitent l’accès des apprenants à la connaissance et aux contenus pédagogiques. Plus récemment, l’intelligence artificielle au service de l’enseignement et de l’apprentissage, la réalité virtuelle et augmentée, les simulations et les jeux sérieux (ou serious game) ont encore élargi les possibilités offertes par l’apprentissage qui s’appuie sur les technologies. Les nouvelles pédagogies interactives reposant sur l’apprentissage en ligne ont elles aussi prouvé leur efficacité.

Cependant, la fracture numérique s’est une nouvelle fois vivement fait sentir lorsque la pandémie de COVID-19 est venue perturber de manière inédite l’enseignement supérieur. Face à l’arrêt de l’apprentissage en présentiel dans plus de 190 pays, de nombreuses institutions ont pu passer rapidement à l’apprentissage en ligne. Toutefois, les limites de ce système sont vite apparues dans les pays à faible revenu, où vivent 96 % des 2,9 milliards de personnes qui n’ont jamais utilisé Internet. De nombreux élèves défavorisés ont vu leurs chances d’accéder à l’enseignement supérieur réduites par le passage à l’apprentissage en ligne.

Parallèlement à ces difficultés, l’enseignement supérieur a cependant occupé une place de plus en plus importante dans le domaine du développement international ces 25 dernières années. Dans les années 1990, avec le mouvement « Éducation pour tous », la communauté internationale s’est concentrée sur l’enseignement de base, avant de porter son attention sur l’enseignement primaire dans les années 2000, dans le cadre des objectifs du Millénaire pour le développement. En 2015, les objectifs de développement durable (ODD) ont replacé l’enseignement supérieur au cœur des objectifs éducatifs à l’échelle internationale, en reconnaissant son importance pour tous les ODD, et en particulier sa contribution à la réussite de l’ODD 4, qui porte sur les systèmes éducatifs équitables et de qualité.

Conférence mondiale de l’UNESCO : l’accès équitable au supérieur, une priorité croissante

L’UNESCO, seule agence des Nations unies titulaire d’un mandat pour l’enseignement supérieur, a organisé deux conférences mondiales pour ce secteur en 1998 et 2009. Lors de la première, les États membres ont été invités à répondre aux nouveaux défis de l’enseignement supérieur en entreprenant de vastes réformes utiles pour faire face à ces enjeux de toute urgence. Dix ans plus tard, en 2009, les parties intéressées se sont toutes engagées, lors de la deuxième conférence mondiale, à reconnaître l’enseignement supérieur comme un bien public afin de faire progresser la recherche, l’innovation et la créativité, et comme un facteur clé pour construire des sociétés de la connaissance inclusives et diverses.

La WHEC 2022, qui se déroulera à Barcelone du 18 au 20 mai 2022, est intitulée Réinventer l’enseignement supérieur pour un avenir durable. Elle mettra en lumière l’importance de l’enseignement supérieur pour répondre aux défis mondiaux actuels tels que le changement climatique, les inégalités sociales, et les conflits, tout en plaidant en faveur de l’ouverture de l’enseignement supérieur à un corps étudiant plus large et plus divers, qui inclue les groupes défavorisés.

La WHEC 2022 contribuera à définir et à élaborer une feuille de route dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 afin de répondre aux défis auxquels l’humanité et la planète sont confrontés. La conférence appelle à « rompre avec les modèles traditionnels de l’enseignement supérieur et à ouvrir les portes à des conceptions nouvelles, innovantes, créatives et visionnaires qui non seulement servent les agendas actuels du développement durable, mais ouvrent également la voie à de futures communautés d’apprentissage qui surmontent les barrières, parlent à tous et sont inclusives de tous les apprenants tout au long de la vie ».

Présence de l’IIPE à la Conférence

Pour l’édition 2022, l’IIPE-UNESCO organisera une table ronde pour évoquer les conclusions de sa récente étude sur les parcours d’apprentissage flexibles (PAF). Ce type de politique permet aux systèmes d’enseignement supérieur de s’adapter aux besoins d’apprenants plus variés, en leur offrant davantage de choix et en éliminant les obstacles qui les empêchent d’accéder au système et de progresser au sein de celui-ci.

En se fondant sur les expériences des pays qui ont participé à cette recherche collaborative, la recherche montre le rôle important joué par les PAF pour réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030, qui préconise des systèmes éducatifs offrant de multiples voies d’accès et de sortie grâce à la reconnaissance de l’apprentissage formel, non formel et informel. Ce thème a donc toute son importance dans le contexte actuel et futur de l’enseignement supérieur.

L’IIPE participera aussi à une table ronde sur la production de données et publie un document d’orientation conjoint avec l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés sur l’accès des réfugiés à l’enseignement supérieur dans les pays d’accueil, en attirant l’attention sur les orientations politiques permettant de soutenir les populations nettement défavorisées et de lever les obstacles à l’apprentissage.