Transformer les environnements d’apprentissage pour promouvoir la réussite des filles

26 Janvier 2021

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Des élèves en Côte d'Ivoire.

En Côte d’Ivoire, la parité entre les sexes diminue significativement avec les niveaux d’éducation et les écarts se creusent particulièrement au secondaire. Mais pour Sekoué Jeanne Kopieu, participante à la première Université de l’IIPE-UNESCO Dakar sur la planification de l’éducation sensible au genre, les inégalités éducatives ne s’arrêtent pas là.

Professeure d’histoire-géographie pendant plus de douze ans, Mme Kopieu avait l’habitude de demander aux jeunes filles ce qu’elles aimeraient faire une fois adulte. Trop souvent, les mêmes réponses revenaient : infirmière, coiffeuse ou couturière. « Pourtant il y a d’autres voies valables à suivre ! Ces aspirations étriquées limitent les opportunités éducatives et alimentent les inégalités professionnelles. Nous devons repenser l’environnement scolaire et nous pencher sur la manière dont les filles sont orientées afin qu’elles aient toutes les chances de réussir ». Alors que les résultats des examens nationaux montrent que les filles réussissent aussi bien que les garçons, elles restent en effet beaucoup moins nombreuses à s’orienter vers des filières prometteuses comme les sciences, la technologie, l’ingénierie ou les mathématiques (STIM).

Si Mme Kopieu a quitté les salles de classe en 1995 pour rejoindre l’administration centrale, son engagement pour promouvoir l’égalité de genre et la réussite de tous les apprenants et apprenantes n’a pas changé : au sein de la direction de l’Égalité et de l’Équité de genre du ministère de l’Éducation de la Côte d’Ivoire, elle agit aujourd’hui comme directrice adjointe au renforcement des capacités de suivi et d’évaluation.

Fervente partisane de l’égalité des sexes, Mme Kopieu affirme avec conviction qu’il s’agit d’une question de droit et que « l’égalité favorise la paix, la cohésion sociale et le développement », des enjeux particulièrement importants pour un pays traversé pendant près de deux décennies par des conflits civils.


« En réfléchissant à ma carrière et à ma progression, j’ai réalisé à quel point le droit à l’éducation vous transformait. Il libère et rend autonome. Si je n’étais pas allée à l’école, je n’aurais pas eu la chance de travailler aujourd’hui et d’être indépendante. »

Aujourd’hui, le gouvernement ivoirien a fait de l’éducation une priorité et a approuvé, en 2020, la politique en matière d’égalité des sexes du ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle. « De plus, des réformes substantielles sont attendues avec notamment la construction prochaine de 80 collèges et de deux sections de l’École normale supérieure où la question de l’égalité des sexes sera intégrée à tous les niveaux », explique Mme Kopieu, ajoutant que cette question est suivie par le cabinet du premier ministre. 

Engager l’ensemble de la communauté éducative

Pour parvenir à des changements durables, Mme Kopieu croit en une approche holistique afin de transformer les environnements scolaires. C’est la communauté éducative dans son ensemble qui doit être sensibilisée au respect des filles et à la nécessité d’élaborer et de diffuser des codes de conduite applicables à l’ensemble du personnel et des élèves. « Davantage de personnel féminin doit aussi être nommé pour protéger les filles et parler avec elles de leurs préoccupations, afin que ces dernières trouvent en l’école, un espace sécuritaire et la possibilité de s’exprimer sur des sujets qu’elles n’ont pas nécessairement l’opportunité d’aborder dans le cadre familial. »

Au niveau de la direction des établissements, les progrès sont encourageants : le nombre de cheffes d’établissement est passé de 20 % en 2010 à 42 % en 2020 dans l’enseignement secondaire général. La direction de l’école joue un rôle crucial selon Mme Kopieu : « Il lui revient d’impulser et d’imprimer à l’école une dynamique de respect mutuel – entre personnel enseignant et élèves, aussi bien qu’entre élèves, filles et garçons – qui permette aux filles d’être plus motivées pour réussir à l’école et de s’engager dans des filières non traditionnelles ».

Sensibiliser les personnels des établissements scolaires aux questions de genre fait plus que jamais partie des préoccupations de la direction de l’Égalité et de l’Équité de genre du ministère de l’Éducation. Un référentiel des métiers a ainsi été élaboré, de même qu'un plan de formation continue du personnel du ministère, y compris les chefs et cheffes d’établissement scolaire. Au nombre des modules retenus et dispensées dans le cadre de l’opérationnalisation de ce plan figure un module consacré à la problématique genre dans l’orientation scolaire et professionnelle.

 

A propos de l'Université 2020

Organisée dans le cadre de l'initiative "Gender at Centre" (Priorité à l’égalité), cette formation gratuite est destinée aux personnes en charge de la planification et aux responsables de l'éducation dans les pays d'Afrique francophone. Basée sur une approche d'apprentissage interactive et orientée vers la pratique, l’Université s'inscrit dans le cadre des efforts de l'IIPE pour réduire les inégalités entre les sexes dans l'éducation.

Les participant.e.s ont ainsi pu acquérir une compréhension approfondie des questions d'égalité des sexes dans et par l'éducation, et analyser les différentes causes de disparités. Elles et ils ont été amenés à identifier et analyser les indicateurs et les sources de données pertinents, ainsi qu’à expliquer le processus de planification des politiques. Enfin, les participant.e.s ont travaillé sur des stratégies et des actions concrètes pour lutter contre les disparités entre les sexes, y compris leurs coûts, les calendriers de mise en œuvre et les méthodes d'évaluation et de suivi de l'impact.