En Afrique, la transformation de la formation professionnelle est en marche

08 Mai 2021

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IIPE-UNESCO Dakar
Au Sénégal, trois apprenti˖e˖s du Centre sectoriel de formation professionnelle / Bâtiment et travaux publics

Les 15-24 ans représentent 20 % de la population africaine mais plus de 40 % des chômeurs. Les parcours d’enseignement et formation techniques et professionnels (EFTP) ont un grand rôle à jouer pour favoriser leur insertion professionnelle et lutter contre la précarité. Tandis que les systèmes d’EFTP amorcent une transition en Afrique, gros plan sur des synergies fructueuses et des pratiques innovantes soutenues par l’IIPE-UNESCO.

Renforcer l’adéquation entre l’offre de formation professionnelle et la demande des employeurs est un enjeu majeur en Afrique.  Dans un contexte où l’économie informelle est prégnante et les marchés du travail très volatiles, le décalage entre compétences disponibles et besoins de l’économie est en effet un frein à l’emploi et à la croissance. Ce défi de l’employabilité est d’autant plus grand que le continent verra arriver a minima cent millions de jeunes sur le marché du travail d’ici 2030 en raison du boom démographique.

Devant ce constat, les systèmes nationaux d’EFTP doivent se transformer pour gagner en agilité. C’est l’un des axes prioritaires de l’IIPE-UNESCO Dakar. À travers sa Plateforme d’expertise en formation professionnelle (PEFOP), l’Institut apporte un soutien aux États africains, en capitalisant sur des expériences de terrain et sur les bonnes pratiques du secteur.

Mutualiser les ressources et outils

Face au défi commun de l’insertion professionnelle des jeunes, les huit pays membres de l’Union Économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA)  fédèrent leurs forces (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo). Depuis 2017, leurs ministères en charge de la formation professionnelle partagent les curricula de leurs programmes d’EFTP et leurs référentiels métiers. Ils mettent également à la disposition de leurs homologues des contenus pédagogiques ou les documents décrivant leurs méthodes de gouvernance. Objectif : permettre à chacun de s’en inspirer puis, le cas échéant, de les adapter aux besoins nationaux. 

Développée avec l’appui de l’IIPE-UNESCO Dakar, cette Plateforme de mutualisation des outils et ressources de la formation professionnelle s’est dotée d’un portail web. On y trouve, par exemple, le référentiel de la formation des installateurs d’électricité solaire créé par le Bénin, ou le guide méthodologique du Sénégal pour élaboration de programmes de formation selon l’approche par compétences. Les membres peuvent accéder à des centaines d’autres ressources utiles pour structurer et rénover les systèmes d’EFTP.  Les pays de l’UEMOA ont depuis été rejoints par le Tchad, avec l’ambition d’impliquer d’autres pays du continent dans cette dynamique régionale de partage.

« Nous encourageons les approches régionales pour la planification et la gestion de l’enseignement et de la formation techniques et professionnels en Afrique. La plateforme de mutualisation de l’UEMOA illustre bien cette dynamique. C’est un atout évident pour renforcer collectivement l’offre et les dispositifs de formation professionnelle. L’initiative a d’ailleurs clairement prouvé son utilité dans le cadre des stratégies de riposte à la pandémie. »

Naceur Chraiti, responsable de programme EFTP à l’IIPE-UNESCO Dakar

Engager la digitalisation de l’EFTP

Une Initiative panafricaine pour la transformation digitale de l’EFTP et des systèmes de développement des compétences en Afrique a été lancée en mars 2021 par l’UNESCO et l’Union africaine. A travers plusieurs actions complémentaires, dont la création de réseaux nationaux et d’un programme de formation panafricain, cette initiative cherche à outiller les acteurs du secteur, pour les aider à prendre le virage digital.

EFTP : pourquoi le digital est-il si important ?

Souvent fondées sur la pratique et l'acquisition de gestes techniques, les parcours d’EFTP n’ont a priori pas de lien direct avec le monde digital. Pourtant, cette question doublement est cruciale, sur le plan des modalités d’apprentissage et des compétences numériques.

  • D’une part, la digitalisation des contenus de formation et des environnements d'apprentissage permet de répondre aux besoins d’enseignement à distance, qui se sont accélérés dans le contexte pandémique. Au-delà des enjeux sanitaires, le digital apparaît surtout comme une solution pour gagner en réactivité dans le déploiement et la réactualisation des offres de formation. C’est aussi un levier pour élargir l’accès et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie, en écho à l’Objectif de Développement Durable n°4 des Nations Unies.
  • D’autre part, face aux mutations technologiques liées à l’automatisation des processus de production ou aux nouveaux usages numériques, les apprenti˖e˖s et apprenant˖e˖s doivent acquérir des compétences digitales de base, qui seront bientôt incontournables dans la plupart des métiers. Les systèmes d’EFTP en Afrique doivent s’adapter à cette nouvelle donne en contribuant à l’alphabétisation numérique et à l’indispensable montée en compétences digitales des populations du continent.

 

Si la digitalisation ne manque pas d’atouts pour le secteur de la formation professionnelle, les obstacles restent nombreux, notamment en matière d’équipement des apprenant˖e˖s ou d’accès à Internet. Associé à cette initiative panafricaine, l’IIPE-Dakar va lancer prochainement un état des lieux de la digitalisation de l’EFTP en Afrique.

Afin d’aider les pays africains à gérer l’EFTP pendant la pandémie, l’Institut assure en outre un travail continu de collecte et d’analyse de bonnes pratiques. Initiées par des acteurs publics ou privés, elles sont susceptibles d’inspirer et de renforcer les futures politiques en matière de gestion et de planification du secteur en Afrique. Une grande partie de ces initiatives relève directement des enjeux de digitalisation.

Qu’est-ce que la PEFOP ?

Depuis 2015, l'IIPE-UNESCO Dakar œuvre au renforcement des capacités des acteurs de l’enseignement et de la formation techniques et professionnels en Afrique, à travers sa Plateforme d’expertise en formation professionnelle. Ce programme d’action est adossé à un portail web thématique, visant à informer sur les actualités du secteur et partager ressources et bonnes pratiques