Évolution des orientations dans la planification de l’éducation : Regard en arrière et regard vers l’avenir

06 Juin 2023

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IIEP-UNESCO
Marc Bray, ancien directeur de l'IIPE et Raymond Wanner, ancien président du conseil d'administration de l'IIPE en 2007.

Cet article a été rédigé par Mark Bray, ancien directeur de l'IIPE.

Réfléchir au 60e anniversaire de l'IIPE m'amène à regarder en arrière, et en particulier à revisiter l'ouvrage publié en 2011 par l'IIPE que j'ai codirigé avec N.V. Varghese. Il s'intitule Directions in Educational Planning : International Experiences and Perspectives. L'ouvrage s'appuie sur des documents présentés lors d'un colloque organisé en 2008 en l'honneur du travail de Françoise Caillods, qui a pris sa retraite en 2008 suite à presque quatre décennies de service au sein de l'IIPE. Ce colloque a été l'occasion de réfléchir aux évolutions passées en matière de planification de l'éducation, d'analyser les changements actuels et de tirer des leçons pour l'avenir. Aujourd'hui, ce 60e anniversaire stimule une réflexion similaire et actualisée.


La préface de l'ouvrage de 2011 rappelle le Volume 1 de la série de l'IIPE intitulée Principes de la planification de l'éducation. Ce volume avait été écrit par le Directeur fondateur de l'Institut, Philip H. Coombs, et s'intitulait Qu'est-ce que la planification de l'éducation ? Coombs avait fait remarquer que la planification de l'éducation était bien trop complexe pour être enfermée dans une définition valable pour toujours. Même à cette époque, Coombs soulignait (p.24) que :

« La planification qui ne permet qu’une stratégie d’expansion linéaire ne sera plus de mise ». Il ajoutait que « la planification doit désormais permettre une stratégie de changement et d’adaptation de l’éducation » et que cela nécessitait « de nouveaux concepts et d'outils de planification qui sont en train de se dessiner ».

Dans l'ouvrage de 2011, Françoise Caillods évoque un atelier de 1988 dans lequel elle a joué le rôle de leader. Cet événement, organisé à l'occasion du 25e anniversaire de l'IIPE, portait sur les perspectives de la planification de l'éducation. À cette époque, note Françoise Caillods dans sa réflexion de 2011, le rôle de l'État était remis en question, de nouveaux paradigmes de gestion se renforçaient et les révolutions dans les technologies de la communication affectaient radicalement les niveaux et les structures de l'emploi. Ces facteurs, a-t-elle observé, ont contribué à cette époque à une « perte de confiance dans la planification de l'éducation ». 

Cependant, Caillods a ensuite mis en évidence les adaptations et les évolutions, en notant en particulier l'impact de la Conférence mondiale sur l'éducation pour tous (CMEPT) de 1990 à Jomtien, en Thaïlande, et du Forum mondial sur l'éducation (FME) de 2000 à Dakar, au Sénégal. Selon elle (p.292), ces interventions et engagements internationaux, ainsi que ceux qui y sont associés, « ont considérablement contribué à restaurer le statut de la planification de l'éducation ». Jamais auparavant autant de plans n'avaient été préparés et les processus de planification sont devenus beaucoup plus participatifs. 

Cependant, dans les pays les moins développés, suggère Caillods (p.294), on est passé « de l'absence de planification à un trop grand nombre de plans » ; et dans les pays plus avancés, les plans nationaux ont été remplacés par des programmes et des projets pluriannuels. En effet, ajoute Caillods (p.295), dans ce contexte, « il semble que le marché prévale avec une opération stratégique minimale au niveau national », bien que des stratégies éducatives soient développées au niveau supranational par des organismes tels que l'Union européenne.

Le calendrier a avancé d'une douzaine d'années depuis le livre de 2011, ce qui soulève la question de ce que les années ont apporté. Les objectifs de développement durable (ODD) fixés en 2015 ont été particulièrement marquants pour le mandat de l'IIPE. Ces objectifs sont fixés à l'horizon 2030, ce qui nous place actuellement à mi-parcours, conscients à la fois des progrès et des lacunes.

Parallèlement, il y a eu les bouleversements dus au COVID-19, des changements politiques de toutes sortes, une plus grande prise de conscience du changement climatique et de nouvelles avancées technologiques qui ont considérablement modifié les canaux de communication et continueront à remodeler les dimensions de l'emploi.

Dans ce scénario en évolution, les remarques finales (p.307) de l'ouvrage de 2011 restent valables. L'ouvrage soulignait que « la certitude la plus grande est probablement que la nature de la planification de l'éducation va continuer à changer ». Le paragraphe poursuit en observant qu'au niveau technique, de nouveaux outils seront disponibles et qu'au niveau conceptuel, de nouvelles opportunités et de nouveaux défis se présenteront. « Toutefois, il est probable que le secteur connaîtra également de fortes continuités et qu'il s'appuiera sur les fondements établis par l'IIPE en tant qu'institution, en collaboration avec ses homologues dans différents lieux internationaux, nationaux et infranationaux. »

Pour terminer sur une note personnelle et historique, j'ajoute une photo de moi (à gauche) avec Raymond Wanner (à droite), qui était alors Président du Conseil d'administration de l'IIPE. L'occasion était l'inauguration en 2007 de la salle Coombs au dernier étage du bureau de l'IIPE à Paris. La photo de Coombs figure au centre de l'image. Il serait à juste titre fier de la manière dont l'Institut a contribué, au fil des décennies, au développement international, national et infranational et l'Institut peut être fier de la manière dont il a mené et s'est adapté à l'évolution des circonstances pour réaliser et étendre la vision de Coombs. 

Cet article a été rédigé par Mark Bray, dont les contacts personnels avec l'IIPE remontent à 1975, alors qu'il était étudiant en master à l'université d'Édimbourg (Royaume-Uni) et qu'il effectuait des recherches sur l'universalisation de l'enseignement primaire au Nigéria. Ses liens avec l'IIPE se sont développés dans les années 1980 et 1990 et, en 2006, il est devenu le huitième Directeur de l'Institut. Il occupe ce poste jusqu'en 2010, en congé de l'Université de Hong Kong (HKU). Depuis son retour à Hong Kong, il est titulaire de la Chaire UNESCO de l'HKU en Éducation Comparée