Fermeture des écoles : trois recommandations pour plus d’équité face à la pandémie de COVID-19

28 Mars 2020

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Image: Kate Holt

Par Stefania Giannini, Sous-Directrice générale de l’UNESCO pour l’éducation, et Suzanne Grant Lewis, Directrice de l’IIPE-UNESCO

De la fermeture des écoles à l'interdiction de voyager en passant par le confinement à domicile, les pays et les villes intensifient leurs efforts pour ralentir la propagation du nouveau coronavirus, la COVID-19. Ces mesures ont un impact direct sur l’éducation : un nombre record d'enfants, de jeunes et d'adultes ne peuvent plus aller à l’école ou à l’université.

Selon les estimations de l’UNESCO du 31 mars 2020, 185 pays ont fermé l’intégralité de leurs établissements scolaires, soit plus d’1,5 milliards d’enfants et de jeunes qui ne sont plus scolarisés (voir la carte mondiale des fermetures d'établissements scolaires en raison du COVID-19). Onze autres pays ont mis en place des fermetures localisées. 

D’ores et déjà, puis pour les semaines à venir, se pose la question de l’équité dans l’éducation : quelles conséquences ces fermetures auront-elles sur les élèves les plus vulnérables ? 

Mieux anticiper les risques pour les plus vulnérables


Afin de limiter la propagation du coronavirus et l’engorgement des structures de santé qui peineraient à prendre en charge une arrivée massive de patients dans un état grave, les autorités sanitaires de nombreux pays ont recommandé de fermer des écoles. Dans certains cas, le confinement est vu non seulement comme un acte de solidarité, mais aussi comme une mesure impérative pour protéger la santé publique.

A l’évidence, le confinement et la fermeture d’écoles vont avoir des conséquences à long terme pour les personnes les plus vulnérables et les plus marginalisées. Les disparités existantes dans les systèmes éducatifs vont s’exacerber. Au-delà du manque pédagogique, de nombreux enfants et jeunes ne bénéficient plus des repas sains servis à l’école et subissent les répercussions économiques et sociales de cette crise. 

Planifier les fermetures d’école pour assurer l’équité 


Il est essentiel de prendre en considération les risques d'exacerbation des disparités, et des leçons peuvent déjà être tirées de la crise liée à la COVID-19 :

1. Lutter contre la fracture numérique

Depuis la fermeture des écoles, de nombreux établissements proposent des solutions éducatives en ligne. Néanmoins, il est fondamental de lutter contre la fracture numérique, notamment concernant l’accès des élèves aux cours et la préparation des enseignants, sans oublier la communication entre écoles et familles. En amont, mais aussi après la fermeture des écoles, des partenariats entre acteurs publics et privés peuvent contribuer à garantir que tous les élèves aient un accès aux technologies de l’information ou à des programmes radiophoniques et télévisuels déjà utilisés, avec succès, dans des contextes de crises. 

Former les enseignants à l’utilisation de logiciels et de plateformes éducatives en ligne en amont des crises permet une transition plus fluide vers des modes d’apprentissage alternatifs en temps de crise. Pour ceux qui ne sont pas familiers de ces outils, il peut être intéressant d’organiser de courtes sessions de formation. Développer la communication entre enseignants et familles hors crises et prolonger ce lien pendant la période d’apprentissage à la maison permet aussi de mieux accompagner les enfants les plus à risque.

2. Garantir des repas équilibrés en-dehors des écoles

Pour les élèves qui comptent sur l’école pour bénéficier de repas sains, il faut prévoir des solutions. Un article publié (en anglais) sur le blog de l’UNESCO met en lumière des mesures adoptées dans plusieurs pays.

Parmi les approches déjà mises en place, la livraison de repas aux élèves grâce à des bus scolaires ou encore des services de livraison à domicile permettent un approvisionnement direct aux familles. Une autre solution innovante est actuellement testée à San Diego, aux États-Unis : des plats cuisinés à emporter sont proposés grâce à une étroite collaboration avec les autorités locales en charge de l’alimentation et de la nutrition.

3. Prévoir des alternatives pédagogiques inclusives 

Il est impératif que les instances éducatives portent une attention particulière aux besoins très divers de tous les apprenants pendant la fermeture des écoles. C’est crucial pour les enfants rencontrant des difficultés d’apprentissage et pour lesquels travailler à distance de façon autonome peut s’avérer difficile. Ces élèves pourraient, par exemple, bénéficier d’un enseignement collectif restreint, en petits groupes, d’un accompagnement individuel quotidien en ligne avec les professeurs ou encore de sessions en vidéoconférence avec d’autres apprenants. Les parents ou les soignants remplaçant temporairement les enseignants pendant les fermetures d’écoles doivent, quant à eux, recevoir les ressources pédagogiques nécessaires.

Soutien de l’UNESCO aux gouvernements

 

Durant cette crise, l’UNESCO propose des orientations pour accompagner la transition des systèmes éducatifs d’un apprentissage traditionnel vers un apprentissage numérique. L’organisation fournit également des ressources pédagogiques numériques gratuites ainsi qu’un répertoire de plateformes éducatives nationales conçues pour aider à la continuité des programmes scolaires. Pour en savoir plus, les mesures prises par l’UNESCO pendant la crise COVID-19 sont accessibles ici.

L’Institut international de planification de l’éducation de l’UNESCO (IIPE-UNESCO) apporte un appui technique aux instances éducatives dans la planification adaptée aux situations de crise, permettant notamment de répondre aux enjeux d’équité dans l’éducation. Ce type de planification permet non seulement de sauver des vies, mais aussi de réduire le coût de l’après-crise, si les responsables de l’Éducation et leurs partenaires anticipent les risques et prennent des mesures en conséquence.

La planification adaptée aux situations de crise ne peut pas être à courte vue. Elle doit se concrétiser par une préparation et une prévention systématiques des crises. Les systèmes éducatifs doivent être conçus de sorte à pouvoir non seulement répondre aux défis du quotidien, mais aussi contribuer à prévenir, anticiper et atténuer les crises, ainsi qu’à s’en relever.

Cet article a été également publié sur le World Education Blog du Rapport mondial de suivi sur l’éducation (en anglais).