Formation professionnelle : trois innovations au cœur des territoires africains

26 Mai 2021

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SODEFITEX
Session de formation en langue pulaar sur l'utilisation du GPS, dans la région de Kolda, au sud du Sénégal.

Comment les systèmes d’enseignement et de formation techniques et professionnels (EFTP) s’adaptent-ils aux besoins de main-d’œuvre des économies locales et aux réalités territoriales ? Les initiatives des entreprises privées et de la société civile sont souvent essentielles pour compléter l’offre officielle des lycées techniques et centres de formation. Trois projets innovants bénéficient d’un soutien technique et financier du bureau pour l’Afrique de l’IIPE-UNESCO dans le cadre de sa Plateforme d’expertise en formation professionnelle (PEFOP).

Au Burkina Faso, accompagner les jeunes défavorisés vers l’emploi

Guider les jeunes de A à Z, depuis leur orientation jusqu’à leur placement dans les entreprises locales, une fois formés. C’est l’objectif visé par la Christian Relief and Development Organization au Burkina Faso, avec son Service de placement d'emploi et de développement d'entreprises (SPEDE). Adossé à un réseau de lycées techniques et de centres de formation, le SPEDE expérimente depuis 2019 une nouvelle approche inversée, qui conditionne le déclenchement du cycle de formation à la signature d’un contrat avec une entreprise de la région de Bobo-Dioulasso, dans le sud-ouest du pays. En prise directe avec les besoins réels des employeurs, ce dispositif vise des jeunes déscolarisés ou des jeunes adultes sans qualification, issus de communautés défavorisées. En 2020, ce programme a été suivi par plus de 930 apprenant˖e˖s Avec l’appui de l’IIPE, l’organisation non-gouvernementale entend désormais faire reconnaître officiellement le SPEDE par le ministère burkinabé en charge de l’EFTP.

Au Cameroun, favoriser l’entreprenariat des jeunes femmes dans des zones de crise

Marquées par de violents conflits, les régions rurales du Grand Nord camerounais doivent composer avec une offre scolaire et de formation fragile et peu développée. Pour combler les manques, les écoles familiales essaient depuis quinze ans d’organiser des formations agricoles, alternatives au système officiel d’EFTP, avec les faibles moyens dont elles disposent. Elles s’adressent à des populations isolées, et notamment aux jeunes femmes, pour la plupart analphabètes. Pour unir leurs forces, les écoles ont créé la FEREFAN: Fédération régionale des Ecoles Familiales Agricoles du Grand Nord. « L’appui de l’IIPE-UNESCO Dakar consiste à accompagner les écoles membres de la FEREFAN pour formaliser et pérenniser cette offre de formation atypique mise en place par des bénévoles. L’objectif, à terme, est de parvenir à la faire reconnaitre par les autorités compétentes au niveau national », explique Louise Herbaut, consultante pour l’IIPE Dakar. Pour l’année scolaire 2019-2020, près de 400 apprenant˖e˖s ont suivi ces formations, dont 80 % de filles.

Au Sénégal, vers une certification nationale pour des formations en langues locales

La Société de développement et des fibres textiles (SODEFIDEX) travaille avec des dizaines de milliers d’exploitations agricoles familiales et de coopératives productrices de coton, en particulier dans le tiers sud du Sénégal. Dans les années 2000, l’entreprise a commencé à proposer ses propres cours d’alphabétisation, destinés notamment aux saisonniers dans les villages. Elle a ensuite développé des programmes plus poussés de formation professionnelle pour répondre au besoin de nouveaux métiers ruraux liés aux évolutions de l’agriculture. Ces enseignements sont dispensés dans les langues parlées par les populations agricoles de la région, en particulier le pulaar, le mandingue et le wolof. En 2017, la SODEFITEX a souhaité professionnaliser sa démarche selon l’approche par compétences, avec l’appui de l’IIPE-UNESCO Dakar. De nouveaux référentiels ont ainsi été crées et validés par le ministère de l’Emploi et de la Formation professionnelle du Sénégal.

Suite à cette première étape, trois nouveaux curricula de formation ont été conçus, pour les métiers de chef˖fe˖s de culture et d’exploitation agricole et de technicien˖ne˖s en production végétale. Reste maintenant à finaliser la traduction de tous les documents et contenus de formation en langues locales, avec les inspecteurs du ministère. Cette transcription concerne prioritairement le pulaar : la langue la plus utilisée dans la zone. SODEFITEX vise l’ouverture de cinq classes d’une trentaine de personnes chaque année. Une fois formés, ces techniciens et producteurs de coton pourront à leur tour former les populations agricoles directement sur leur lieu de travail dans les villages.