Le rôle prometteur des systèmes intégrés de gestion des ressources humaines en Afrique

19 Avril 2021

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Adam Jan Figel / Shutterstock.com
Une enseignante dans une classe de primaire en Ouganda.

Le Sénégal, l’Ouganda, la Côte d’Ivoire… Plusieurs ministères africains de l’Éducation se sont dotés d’un système d’information des ressources humaines (SIRH) pour gérer et piloter le déploiement des enseignants. D’autres, comme le Burkina Faso, le mettent en place actuellement, avec le support technique de l’IIPE. Si le niveau d’avancement et le périmètre de ces projets sont variables, les plateformes SIRH contribuent à améliorer la qualité de l’éducation. Reste que ces chantiers informatiques sont complexes, tant sur le plan technologique qu’organisationnel.

La gestion des enseignants relève généralement de plusieurs ministères. Celui en charge de la Fonction publique les recrute et gère leur carrière. Celui des Finances intervient sur la rémunération. L’Éducation nationale, enfin, assure le déploiement des effectifs sur le territoire et gère les mobilités. Alors que tous ces processus de gestion sont intimement liés, les bases de données dont ils dépendent sont rarement interconnectées.

Résultat : les informations relatives aux enseignants (grade, école d’affectation, situation administrative) sont collectées à travers plusieurs systèmes informatiques qui ne communiquent pas entre eux. Cela entraîne des ressaisies manuelles, une duplication de la charge de travail et donc des risques d’erreur et de retard. Selon l’IIPE-Dakar, le taux d'aléas dans les processus d'allocation des enseignants peut aller jusqu'à 73 % en Afrique sub-saharienne. Si les facteurs de ces dysfonctionnements sont multiples, ils s’expliquent en partie par le manque d’outils intégrés pour éclairer les prises de décision. 

« Avec l’expansion de la scolarisation en Afrique, les enseignants sont une ressource rare. Maîtriser les effectifs d’enseignants est impératif pour atteindre les Objectifs de développement durable. Ces réflexions amènent les pays à se doter d’outils performants. Nous constatons un intérêt grandissant pour les SIRH dans les ministères de l’Éducation en Afrique. »

Barbara Tournier, chercheuse à l’IIPE.

Un SIRH, qu’est-ce que c’est ?

Un système d’information des ressources humaines est une plateforme informatique permettant d’établir des passerelles entre les différents systèmes ou logiciels utilisés. Elle automatise les mécanismes d’échange d’information et émet des alertes en cas d’anomalies.

Ainsi, dans le contexte de l’éducation, le simple fait de saisir l’acte de recrutement, d’affectation ou de promotion d’un enseignant sur la plateforme met à jour immédiatement les autres bases de données. Le système peut aussi être configuré pour demander automatiquement les signatures ou validations requises aux acteurs concernés. « Une plateforme SIRH doit rendre service à toutes les structures impliquées dans les processus de gestion des enseignants. C’est seulement s’il y a un partenariat gagnant-gagnant que les pratiques peuvent évoluer », explique Khadim Sylla, expert des systèmes d’information à l’IIPE. Toutefois, ce type de plateforme ne permet pas de résoudre à lui-seul tous les problèmes des ressources humaines des ministères.  « Les systèmes informatiques ne sont que le reflet des structures organisationnelles, des procédures et des processus de gestion », souligne Barbara Tournier.

Des données actualisées : condition d’une planification équitable de l’éducation

Classes surchargées, enseignants moins qualifiés dans les zones rurales : ces problèmes liés à la répartition des enseignants sont communs à de nombreux pays du continent. Dès lors qu’ils se fondent sur des données fiables et à jour, les tableaux de bord des SIRH permettent d’identifier et de corriger les manques et incohérences. Et donc de contribuer à une éducation plus équitable, plus inclusive et de meilleure qualité.

 « Le SIRH est un levier potentiellement puissant pour mettre à jour les données, tracer les informations, disposer de tableaux de bord du personnel et décentraliser les processus de gestion des ressources humaines. »

Khadim Sylla, expert des systèmes d’information à l’IIPE.

Un défi technologique

Prenant la forme d’applications web, les SIRH permettent aux gestionnaires des ressources humaines (RH) d’avoir la main sur certaines actions jusque-là centralisées au sein du ministère, y compris s’ils sont basés dans des provinces reculées. Dans des pays où l’accès à internet est souvent limité, l’adoption d’un tel outil web n’est toutefois pas évidente. « La plateforme SIRH développée actuellement au Burkina Faso permettra aux agents administratifs de travailler hors connexion, avec un module de synchronisation automatique des données lorsqu’ils accèdent au wifi ou à une clé de connexion », explique Khadim Sylla. Un accompagnement spécifique a en outre été prévu par l’IIPE pour assurer le transfert de compétences et le renforcement des capacités des informaticiens et gestionnaires RH du ministère de l’Éducation.

Certaines des fonctionnalités prévues dans le cahier des charges de la future plateforme RH au Burkina Faso sont inspirées de l’application MIRADOR, mise en place au Sénégal dès 2014. Elle permet à tous les enseignants du pays de se connecter eux-mêmes à la plateforme depuis leur smartphone, pour suivre leur situation administrative et exécuter certaines démarches, comme les demandes de mutation.

Le soutien au Burkina Faso

L’IIPE apporte un appui technique au ministère de l’Éducation nationale, de l’Apprentissage et de la Promotion des langues nationales (MENAPLN). Il a d’abord consisté à formaliser les processus et procédures de gestion des ressources humaines et à diffuser les bonnes pratiques au niveau déconcentré. Cette première étape a constitué un préalable indispensable au développement informatique du SIRH, pour lequel l’IIPE intervient actuellement en support.