Qui enseigne aux réfugiés ? Lancement d'une étude en Éthiopie

21 Janvier 2019

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Helen West/Education Development Trust
Sherkole Refugee Camp in Ethiopia's Benishangul-Gumuz Region.

La plupart des enfants réfugiés passeront toute leur enfance en exil. Pour répondre à leurs besoins éducatifs il faut des solutions politiques innovantes qui mettent les enseignants au cœur du processus. Pour aller dans ce sens, l'IIPE a noué un partenariat avec l'Education Development Trust pour mener une étude sur la gestion des enseignants intervenant auprès des réfugiés en Éthiopie. 

Des études ont montré que la qualité des enseignants et de l’enseignement est, de tous les facteurs sensibles à l’influence de la politique, celui qui influe le plus sur les résultats des élèves. Il en va probablement de même pour les réfugiés, en particulier du fait que les enseignants sont souvent la seule ressource éducative des élèves en période de crise.

Pourtant, selon une revue de littérature effectuée cette année par l’IIPE-UNESCO et l’Education Development Trust (EdDevTrust), on trouve relativement peu de données sur les enseignants qui interviennent auprès des réfugiés, en dehors de données statistiques limitées suggérant une pénurie d’enseignants qualifiés. Il ressort également de la littérature qu’à l’exception de quelques études sur les diplômes et la rémunération des enseignants intervenant auprès des réfugiés, peu d’études s’intéressent au point de vue des enseignants sur les principaux problèmes de fond : recrutement, affectation, développement professionnel et motivation.

Afin de remédier à ce manque d’éléments factuels, l’IIPE a noué un partenariat avec l’EdDevTrust, avec le soutien de l’UNICEF, d’Open Society Foundations et d’autres parties prenantes, pour mener dans plusieurs pays une étude sur la gestion des enseignants intervenant auprès des réfugiés. Il s’agit de déterminer quelles sont les politiques et stratégies de mise en œuvre efficaces et prometteuses pour gérer les enseignants intervenant auprès des réfugiés, ainsi que les possibilités d’élaboration et de mise en œuvre de nouvelles politiques (accéder à la note en anglais ici).

Lancement d'une étude sur la gestion des enseignants intervenant auprès des réfugiés en Éthiopie

L’Éthiopie a été choisie comme pays pilote pour cette étude, non seulement parce qu’elle accueille l’une des populations de réfugiés les plus importantes en Afrique, mais aussi parce qu’elle est l’un des premiers pays à tenter de mettre en œuvre le Cadre d’action global pour les réfugiés, qui se fonde sur le principe de l’intégration des réfugiés au sein des communautés d’accueil. L’Éthiopie a défini et adopté un ensemble de neuf engagements de réforme, dont certaines ont une incidence directe sur l’éducation. Il s’agit notamment de la délivrance d’un permis de travail à tout réfugié qui souhaite devenir enseignant, d’efforts pour scolariser davantage d’enfants réfugiés à tous les niveaux du système scolaire et de tentatives plus générales de mise en place et d’amélioration des services de base à destination des réfugiés.

Si ces évolutions offrent en Éthiopie la promesse d’un plus grand accès des réfugiés à une éducation de meilleure qualité, il y a souvent un énorme décalage entre la façon d’élaborer les politiques et la façon de les mettre en œuvre. Cette étude s’appuie sur des méthodes mixtes à phases multiples pour savoir comment sont interprétées, favorisées et défendues les réformes de fond proposées, au niveau du pays, des régions, des districts et des écoles.

Jusqu’à présent, l’étude a consisté à analyser dans un premier temps des documents de politique, en collaboration avec un groupe d’étudiants de la McCourt School of Public Policy, de l’université de Georgetown, aux États-Unis. En octobre ont eu lieu les premières visites sur place avec l’aide de chercheurs locaux de PRIN International. Les résultats préliminaires de cette première mission de collecte de données montrent combien il est important de s’adapter au contexte, compte tenu des grandes variations observées d’une région à l’autre en Éthiopie, et du caractère très hétérogène de la population réfugiée. Diverses options stratégiques sont nécessaires pour répondre aux besoins éducatifs de millions de jeunes qui considèrent aujourd’hui l’Éthiopie comme leur pays.

Les prochaines étapes

Dans le courant de l’année, un outil d’enquête auprès des enseignants sera affiné et développé dans diverses parties du pays. Une mission de suivi est organisée en Éthiopie début 2019 ; elle comprend notamment des études de cas approfondies et des entretiens avec des parties prenantes clés.

Les enseignants sont bien plus que de simples prestataires de services essentiels. Ils font eux-mêmes partie des communautés concernées et sont potentiellement de puissants agents de réforme politique positive. Avec cette initiative, notre ambition est de contribuer aux études de plus en plus nombreuses sur les enseignants qui interviennent auprès des réfugiés et d’apporter des solutions de fond, basées sur des éléments factuels, pour aider les États membres à répondre à l’appel lancé dans la Déclaration d’Incheon : « Nous ferons en sorte que les enseignants et les éducateurs aient les moyens d’agir, soient recrutés de manière adéquate, jouissent d’une formation et de qualifications professionnelles satisfaisantes, et soient motivés et soutenus au sein de systèmes gérés de manière efficace et efficiente, et dotés de ressources suffisantes. »