Trop vieux pour l'école ? S'attaquer au problème des élèves trop âgés au Liberia

17 Janvier 2023

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©Ministère de l'Éducation, République du Liberia

L'éducation de la petite enfance permet de jeter les bases de l'apprentissage et du développement pour les années à venir. Mais que se passe-t-il lorsqu'un élève inscrit est plus âgé que la moyenne ? Au Liberia, c'est une situation courante, qui a des répercussions sur le reste du système éducatif. En réalité, 92 % des élèves de l'école primaire sont trop âgés pour leur niveau de classe.

Toutefois, la situation pourrait changer, car le Liberia a lancé son nouveau plan sectoriel pour l'éducation (document en anglais) pour les cinq prochaines années (2022-2027) à l'occasion du Jour du drapeau national (24 août), avec le soutien technique de l'IIPE-UNESCO. Le plan présente une série de nouvelles approches et stratégies pour s'attaquer à des problèmes de longue date, comme la scolarisation des enfants âgés, héritage des années de guerre civile au Liberia.

« La tâche essentielle de ce PSE, écrit le président du Liberia, George Manneh Weah, dans l'avant-propos du plan, est d'amener beaucoup plus d'enfants, si ce n'est tous, en particulier ceux des zones plus pauvres et mal desservies, dans le système éducatif à l'âge requis, de veiller à ce qu'ils progressent et terminent leur scolarité à temps dans un environnement sain, sûr et protecteur, et qu'ils quittent l'école avec les compétences fondamentales du XXIe siècle. »

Dans les communautés mal desservies du Liberia, plus des deux tiers des élèves – soit 71 % –ont trois ans de plus que l'âge requis pour leur classe. Souvent, le problème surgit dès le début du parcours éducatif. Au Liberia, près de 40 % des enfants qui suivent un enseignement préscolaire ont entre 6 et 11 ans. Il y a plusieurs raisons au fait que certains parents retardent l'inscription jusqu'à ce que leur enfant puisse marcher tout seul jusqu'à l'école. Les coûts sont également un problème majeur, car l'éducation de la petite enfance (EPE) n'est pas gratuite.

La présence d'enfants plus âgés dans la classe peut avoir un impact négatif sur l'apprentissage. Elle peut donner lieu à des tensions en classe et à des problèmes de sécurité. Les apprenants trop âgés sont également plus susceptibles d'abandonner l'école, ce qui pose la question de l'efficacité et de l'accès équitable à l'apprentissage.

Relever des défis de longue date 

Le nouveau PSE reconnaît les efforts importants nécessaires pour s'occuper des apprenants trop âgés, et pour relever d'autres défis, comme celui d'atteindre ceux qui ne s'inscrivent même pas à l'école. Le ministère de l'Éducation précise également que les répercussions des guerres civiles prendront plus de cinq ans à se résorber.

Toutefois, les architectes et les partenaires à l'origine du plan ont souligné que la nature participative du processus de planification a permis au pays de relever ces défis importants avec des capacités renforcées.

« Le fait que le gouvernement soit aux commandes a permis de définir une vision de l'avenir et d'alimenter la réflexion sur la situation actuelle de l'éducation au Liberia et sur ce qu'elle devrait être », explique Diane Coury, spécialiste du programme de l'IIPE, qui a soutenu le ministère de l'Éducation du Liberia pendant le processus de huit mois.

« L'approche participative et d'apprentissage par la pratique a contribué à un sentiment d'appropriation et de collaboration parmi les fonctionnaires du ministère, et c'est ce qui pose les bases d'une mise en œuvre solide. »

Les actions proposées comprennent l'application de la politique d'inscription des élèves à l’âge requis, l'investissement dans l'EPE publique, afin que les parents soient plus enclins à inscrire leurs enfants au bon âge, l'élimination du redoublement dans l'EPE et les niveaux de base inférieurs, l'orientation des enfants plus âgés vers des programmes d'apprentissage accéléré, ainsi que le développement considérable de ces classes et l'octroi d’avantages supplémentaires à leurs enseignants.

Selon le plan, ne pas s'attaquer à ce problème ne fera que le rendre insurmontable dans les années à venir et compromettre les autres progrès réalisés dans le système éducatif. Par conséquent, le plan cherche à « provoquer un choc initial attendu depuis longtemps afin d'entamer le processus d'éradication des inscriptions d’élèves trop âgés pour leur niveau de classe, en commençant par les niveaux de la petite enfance et du primaire, pour mettre le ministère de l'Éducation sur une voie qui, à terme, conduira à une répartition plus rationnelle des enfants à chaque niveau ».

Des actions audacieuses pour améliorer l'apprentissage, lutter contre la violence sexiste et le changement climatique   

Dans ce contexte, le plan présente des actions audacieuses pour atteindre trois objectifs primordiaux : accroître l'accès équitable, améliorer la qualité et la pertinence de l'enseignement et de l'apprentissage, et renforcer l'efficacité du système. Il accorde également une attention particulière à la réduction des disparités entre les sexes et les régions. Sont ainsi mises en place des stratégies telles que la fourniture d'installations d'eau, d'assainissement et d'hygiène (WASH) adaptées aux besoins des hommes et des femmes, et la subvention des écoles privées dans les zones non couvertes par les écoles publiques.

Pour ce qui est de l'égalité entre les sexes, le PSE intègre cette dimension dans tous les programmes prioritaires définis et s'aligne sur la nouvelle stratégie nationale pour l'éducation des filles. Cette démarche va au-delà de la question de l'accès des filles : elle inclut des solutions concrètes pour lutter contre la violence à l'égard des filles et des femmes et concerne la perception globale des femmes dans la société.

Pour la première fois, le plan sectoriel comprend également des mesures visant à renforcer la résilience du système éducatif, afin que l'apprentissage puisse se poursuivre même en période de crise. Le problème croissant du changement climatique, associé à la pandémie de COVID-19 et à l’épidémie d'Ebola au Liberia en 2014, a révélé l'importance d'être préparé et d'avoir un plan d'urgence.

Dans la région du Grand Monrovia, la hausse du niveau de la mer pourrait mettre en danger quelque 675 000 Libériens. Pour l'éducation, cela pourrait être dévastateur, car l'élévation prévue de 16 centimètres pourrait endommager les écoles et entraîner des taux d'absence élevés chez les enseignants et les étudiants

Pour y répondre, le ministère a pour la première fois inclus de manière proactive dans le PSE, le développement d'un cadre politique sur la réduction des risques de catastrophes et l'adaptation aux changements climatiques ainsi que leur atténuation. Une série d'actions pour une atténuation et une réponse coordonnées sont également incluses, de sorte que la prestation de services éducatifs puisse être maintenue et accessible à tous, quoi qu’il arrive.

Soutenir le Liberia avec son nouveau plan sectoriel pour l'éducation

En tant que partenaire technique dans le développement du nouveau plan sectoriel de l'éducation du Liberia, L’IIPE-UNESCO a fourni un soutien comprenant :

  • une assistance technique durant toutes les phases du cycle de planification, depuis le diagnostic du secteur (l'analyse du secteur de l'éducation) jusqu'à l'élaboration du plan ;
  • une approche qui garantisse un développement participatif du plan, dirigé qui plus est par le gouvernement participative ;
  • un renforcement des capacités pour permettre aux fonctionnaires du ministère de l'Éducation de prendre la tête d'un cycle de planification continu.