Une génération perdue d'apprenants : à quel prix ?

20 Juin 2023

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©Mathilde Tréguier/IIEP-UNESCO
Une école primaire dans le camp de Mbera, à proximité de la frontière entre le Mali et la Mauritanie.

Partout dans le monde, des apprenants réfugiés doivent se battre pour leur droit à une éducation de qualité. Près de la moitié des enfants réfugiés  - 48 % - ne sont pas scolarisés. Au moment où ces enfants sont censés entrer dans l'enseignement secondaire, leur taux de scolarisation chute encore, pour atteindre seulement 37 %. Le coût de cette absence d’éducation est très élevé, tant pour les individus que pour la société dans son ensemble.

Cependant, l’inclusion des réfugiés dans les systèmes éducatifs nationaux peut faire la différence en aidant les apprenants réfugiés à accéder à une éducation de qualité. Cela est d'autant plus important que les perspectives de retour dans les pays d'origine sont généralement incertaines, ce qui souligne l'importance de définir des solutions de long terme. 

L'intégration nécessite une planification adaptée

La planification et la gestion de l’éducation peuvent favoriser l'inclusion effective dans les systèmes éducatifs nationaux. Ainsi, l'élaboration d'un plan d'action chiffré pour l’inclusion des réfugiés peut constituer un moyen pertinent d'accompagner cette transition vers l’inclusion dans les systèmes éducatifs nationaux. L'IIPE-UNESCO travaille avec des partenaires comme l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) pour mettre en place un tel plan, en parallèle d'autres politiques et plans au niveau national.

L'éducation des réfugiés peut réduire la pauvreté, renforcer la cohésion sociale entre les communautés d'accueil et les communautés réfugiées et ouvrir de nouvelles perspectives.

Qu'est-ce qu'un plan d'action chiffré ?

Un plan d'action chiffré permet d’aider à concevoir et prioriser des interventions clés qui soient pertinentes et financièrement viables. Cela est d'autant plus important que la plupart des pays d'accueil de réfugiés - environ 85 % - sont des pays à revenu faible ou situés dans la tranche inférieure des pays à revenu intermédiaire, selon le HCR.

Un plan d'action chiffré implique généralement une collaboration avec les gouvernements nationaux, les communautés réfugiées et d'accueil, et les organisations de la société civile, afin de hiérarchiser les stratégies, les programmes et les activités pour tous les apprenants, et de déterminer le coût financier de l’inclusion des réfugiés dans le système national.

Zoom sur l'intégration des réfugiés dans le système éducatif mauritanien

En Mauritanie, un vaste pays de la région du Sahel, la population déplacée de force a désormais dépassé les 100 000 personnes, dont 40 % ont entre 5 et 17 ans, selon le HCR. Avec une politique d'ouverture datant de plusieurs décennies, la plupart des réfugiés viennent du Mali, et la majorité d'entre eux vivent dans le camp de Mbera, à la frontière entre le Mali et la Mauritanie. Dans ce camp, les enfants réfugiés n'ont souvent qu'un accès limité à une éducation de qualité. Ils reçoivent un enseignement basé sur le programme scolaire malien.

Pour relever ces défis, l'IIPE travaille en collaboration avec le HCR, avec le soutien du BMZ (ministère fédéral allemand de la Coopération économique et du Développement) / GIZ (l'agence de coopération internationale allemande pour le développement) et de l'UE/ECHO (Direction générale pour la protection civile et les opérations d'aide humanitaire européennes de la Commission européenne), ainsi que d'autres partenaires, sur le développement d’un plan d'action chiffré visant à établir les bases de l'inclusion des réfugiés dans le système éducatif national mauritanien.

Ce projet est également mené en lien avec le troisième Programme national de développement du secteur de l'éducation (PNDSE II)  du pays, actuellement développé avec le soutien du Bureau de l'IIPE-UNESCO pour l'Afrique. Ce programme souligne l'importance particulière accordée par le gouvernement mauritanien à l'accès universel, équitable et inclusif à l'éducation, y compris pour les réfugiés vivant dans le pays.

Faire de l'inclusion une réalité

Pour que cela devienne une réalité, il est nécessaire de renforcer le système éducatif existant pour permettre l'intégration des réfugiés, ouvrant ainsi la voie à des bénéfices mutuels pour les communautés réfugiées et d'accueil. Mathilde Tréguier, spécialiste de programme à l'IIPE, explique qu'une approche unique et cohérente, menée par le gouvernement et soutenue par les communautés et les partenaires, est la voie à privilégier.

« Cela permet d'éviter la mise en place de services d'éducation et de formation parallèles, qui sont moins durables et souvent de moindre qualité », explique-t-elle. « Cela garantit également l'inclusion sociale et économique dès le départ, soutient l'autonomie des réfugiés et favorise le développement des économies et des communautés locales. »

Le calcul des coûts et des méthodes de financement de l'inclusion sera basé sur un certain nombre d'étapes importantes, réalisées par l'IIPE et le HCR. Ce processus inclut l'analyse des besoins des réfugiés dans le camp de Mbera et dans les zones d'accueil ; la définition et le chiffrage des programmes et activités pour chaque sous-secteur de l'éducation, du préscolaire à l'enseignement supérieur et l'enseignement et la formation techniques et professionnels (EFTP) ; et l'élaboration d'un cadre de suivi et évaluation.

Le financement de l'inclusion s’appuiera également sur le soutien des partenaires pour accompagner la transition d'un système parallèle, financé par l'aide humanitaire, à un système piloté par le gouvernement, soutenu par des ressources nationales et extérieures. L'inclusion est donc un moyen de faire le lien entre l'humanitaire et le développement.

Enfin, tout au long du processus d’élaboration du plan d'action chiffré, des consultations avec les responsables du secteur de l'éducation en Maurtianie, les bénéficiaires et les donateurs auront lieu afin de s'assurer que les mesures proposées sont pertinentes, soutenues par les principales parties prenantes et réalisables.

Légende: 
Le camp de Mbera, à proximité de la frontière entre le Mali et la Mauritanie.
Crédit photo: 
©Mathilde Tréguier/IIPE-UNESCO