« Les bureaux genre » en première ligne de l'éducation des filles au Nigeria

28 Février 2024

shutterstock_2196224281.jpg

GOALLORD-CREATIVITY/Shutterstock.com

Au Nigeria, où 50 % des filles ne bénéficient pas de l'éducation de base, des efforts de planification importants sont en cours pour promouvoir l'égalité des genres dans et par l'éducation. En première ligne, des bureaux genre (gender desk) dédiés à l'égalité des genres au sein des ministères fédéraux de l'Éducation contribuent à rendre les écoles plus sûres et permettent aux élèves marginalisés de continuer d'apprendre.

« Les bureaux genre sont très importants car le genre est une composante fondamentale de notre société », explique Augustina Apakasa, directrice adjointe de la cellule du genre au ministère fédéral de l'Éducation du Nigeria. « Ils veillent à ce que le genre soit pris en compte dans tous les aspects de l'éducation. »

Les bureaux genre opèrent dans les 36 États du Nigeria et dans le Territoire de la capitale fédérale. Ils mènent des activités telles que des campagnes de plaidoyer et de sensibilisation en faveur de l'égalité des genres et de l'inclusion dans la société, ainsi que des signalements formels de cas d'abus et de violence sexuels à l'école. Ils veillent également à ce que des budgets soient alloués à des activités sexospécifiques.

La formation à la planification de l'éducation tenant compte de la dimension de genre a éclairé le personnel du ministère de l'Éducation sur l'importance d'avoir des bureaux genre dans tout le pays.

Le développement des capacités des bureaux genre  du Nigeria - qui comprennent un ou deux responsables dédiés - a été au cœur de la participation active du ministère à l'Initiative « Priorité à l’Égalité » (GCI). Cette alliance multipartite portée par l'IIPE-UNESCO et l'Initiative des Nations Unies pour l'éducation des filles depuis 2020 vise à accélérer les progrès pour l'égalité des genres dans et par l'éducation. Plus de 1 000 responsables de l'éducation et acteurs  de la société civile en Afrique, y compris au Nigeria, ont suivi des formations sur la planification de l'éducation prenant en compte le genre et des sujets apparentés.

Mme Apakasa explique qu'il y avait auparavant un manque de compréhension quant à l'impact potentiel de la présence active de bureaux genre dans tous les ministères. Mais suite à une formation en 2022, les secrétaires permanents de six États ont renforcé les bureaux genre  dans leur ministère. « L'initiative Priorité à l’Égalité nous a vraiment aidés », affirme Mme Apasaka.

Dans le cadre de ce programme, les participants ont pu perfectionner leurs compétences en leadership et apprendre de nouveaux outils et de nouvelles approches pour devenir des agents du changement pour l'égalité des genres au sein de leurs ministères. Ils  ont également remis en question leurs propres préjugés liés au genre, et un deuxième atelier a permis à trois États d'élaborer des plans d'action pour mettre en œuvre la Politique nationale sur le genre révisée et lutter contre les inégalités de manière pragmatique. Aujourd'hui, ces efforts ont porté leurs fruits avec la nomination de points focaux dans les différents bureaux genre à travers le pays.

Un troisième atelier destiné à des responsables de l'éducation nigérians venant de six autres États aura également lieu en avril 2024, afin de capitaliser sur ces progrès et se focaliser sur l'intégration de l'égalité des genres dans les plans de travail des ministères fédéraux de l'Éducation.

« Nous devons éduquer nos filles »

Ces bureaux, ainsi que la planification de l'éducation prenant en compte le genre, constituent des éléments essentiels pour résoudre le problème de la déscolarisation massive au Nigeria. Selon l'UNICEF Nigeria, seulement 9% des filles les plus pauvres sont scolarisées dans le secondaire, contre 81% des filles les plus riches. Le genre, ainsi que des facteurs tels que la pauvreté, l'insécurité et la géographie, contribuent de manière significative à cette crise.

Conscient de ce défi, le gouvernement a fait de l'éducation des filles une priorité absolue, et son dernier plan stratégique d'éducation pour 2024-2027 vise à faire revenir à l'école 15 millions d'enfants déscolarisés au cours des quatre prochaines années. Le plan comprend également un chapitre consacré à l'éducation des filles. Cependant, Augstina Apakasa note que la mise en œuvre est essentielle pour faire la différence.

« Au Nigeria, l'élaboration de la politique n'est pas le problème, mais la mise en œuvre de cette politique en devient parfois un », dit-elle. Mais Mme Apakasa reste optimiste quant à la réussite de cette nouvelle feuille de route. Dès le départ, le ministère de l'Éducation a privilégié la participation d'un large éventail de parties prenantes, y compris des filles des communautés concernées, afin de garantir une mise en œuvre harmonieuse.

Quelles sont les actualités de l'initiative Priorité à l’Égalité ?

Plus de 40 professionnels de l'éducation de 16 pays d'Afrique anglophone ont participé à la deuxième session en anglais de la formation courte sur la planification de l'éducation sensible au genre, dispensée par l'IIPE entre septembre et décembre 2023. Au cours de ces trois mois, ils ont exploré des sujets tels que les inégalités intersectionnelles dans l'éducation, la budgétisation sensible au genre et l'intégration du genre dans les analyses et la planification du secteur de l'éducation.

Trente membres de la Communauté de pratique en genre et éducation venant de toute l'Afrique francophone ont également participé à un atelier d'une semaine à Dakar en octobre 2023, organisé par le bureau régional de l'IIPE pour l'Afrique dans le cadre d'un programme de coaching intensif de six mois. L'atelier a porté sur les données, couvrant des aspects allant de la collecte et l'analyse à la diffusion et l'utilisation pour une éducation transformatrice en matière de genre. Les participants ont partagé les meilleures pratiques de leurs pays et ont renforcé le mouvement initié par la GCI vers une éducation transformatrice pour l’égalité des genres.