IIPE-UNESCO : histoire d’une institution pionnière

 

Premier conseil d’administration de l’IIPE en juillet 1963

L'Institut international de planification de l'éducation de l'UNESCO est créé en juillet 1963, dans un contexte d'expansion et de changement sans précédent pour l'éducation. La science, la technologie, le développement économique, la politique et la culture connaissant alors des changements majeurs, qui allaient tous avoir un certain impact sur l'éducation. 

Au même moment, la reconstruction européenne progresse au cours des années d'après-guerre, et une vague de décolonisation traverse l'Afrique subsaharienne en 1960 lorsque 17 nations accèdent à l'indépendance. Cet ensemble d’événements marque le début d'une nouvelle ère, et un domaine en plein essor - la planification de l'éducation - voit le jour pour guider les pays dans la mise en œuvre de systèmes éducatifs en phase avec ces temps nouveaux. 

L'IIPE est créé à Paris, à l'initiative de l'UNESCO et avec le soutien de la Banque mondiale, du gouvernement français et de la Fondation Ford en tant que principaux partenaires fondateurs et financiers. Le gouvernement français propose également d'accueillir l'Institut.

Dès le départ, l’IIPE est conçu comme une organisation autonome et multidisciplinaire, destinée à soutenir les capacités de planification de l'éducation dans les pays en développement, à créer des liens entre les acteurs internationaux, et à proposer une expertise sur les questions stratégiques en matière d'éducation.

Assurer le droit à l'éducation passe par la planification

L'éducation est un droit humain fondamental. Elle est au cœur de la mission de l'UNESCO, qui appelle les nations à collaborer pour réaliser l’idéal d’une chance égale d’éducation pour tous, sans distinction de race, de sexe ni d’aucune condition économique ou sociale.

Reflétant cette mission, l'UNESCO adopte la Convention concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l'enseignement le 14 décembre 1960. Deux ans plus tard, le 22 mai 1962, la Convention entre en vigueur, devenant ainsi le premier instrument international majeur de l'UNESCO ayant une valeur contraignante en droit international, et une pierre angulaire de son travail pour les décennies à venir. 

En parallèle, l'UNESCO commence à recevoir de nombreuses demandes d'assistance technique de la part de pays en développement. Une partie de ces demandes émerge des conférences sur l'éducation que l'UNESCO organise dans toutes les régions du monde - d'Addis-Abeba à Karachi, en passant par Santiago du Chili - à la fin des années 1950 et au début des années 1960, dans le but de participer à l'élaboration de politiques et de stratégies éducatives et de financer l'éducation. 

Au même moment, le lien entre éducation et développement économique national devient plus clair. L'éducation est considérée non seulement comme un droit humain fondamental, mais aussi comme un investissement permettant de stimuler la croissance économique.

La demande d'éducation augmente donc rapidement, et la planification de l’éducation suit ce rythme. Les parents veulent inscrire leurs enfants à un rythme sans précédent, et la démocratisation de l'éducation, associée à une croissance démographique record, met à rude épreuve les systèmes éducatifs existants. 

Une organisation dédiée qui gagne du terrain 

L'idée de créer un institut de planification de l'éducation apparaît pour la première fois lors de la conférence de Washington sur la croissance économique et l'investissement dans l'éducation, organisée par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en octobre 1961. 

Puis, en juin 1962, une commission consultative de l'UNESCO explore l'idée d'un institut international consacré à la recherche et à la formation dans le domaine de planification de l'éducation.

Les participants discutent de sa mission, de sa structure et de sa gestion. Il est convenu que l'IIPE serait un lieu pluridisciplinaire où les éducateurs, les économistes et les sociologues pourraient suivre des cours et acquérir des expériences utiles. Un consensus se dégage également sur l’autonomie de l’institution, prérequis nécessaire pour attirer des experts et des étudiants de haut niveau. 

« Je ne connais pas d'activité humaine plus importante, à ce moment de l'histoire du monde, que la recherche et l'enseignement dans le domaine de la planification de l'éducation, et je n'en connais pas de plus difficile ».

C.E. Beeby, Président du Conseil exécutif de l'UNESCO, Première session du Conseil d'administration de l'IIPE, 18 juillet 1963.

Dès le départ, cette autonomie est considérée comme la condition qui lui permettrait "d'acquérir la stature intellectuelle que l'on attend d'elle", selon les termes de René Maheu, alors directeur général de l'UNESCO.

« Certes, la planification ne crée pas le développement mais il ne saurait y avoir de développement sans planification. De plus, la planification est une discipline intellectuelle qui oblige les gouvernements à penser le présent en termes de futur et à penser le futur en termes de choix délibérés ».

René Maheu, Directeur général de l’UNESCO, première session du Conseil d’administration de l’IIPE, 1963.

Sur cette base, l'IIPE se voit attribuer un statut institutionnel spécial au sein de l'UNESCO, qui lui donne la flexibilité, la souplesse et la force nécessaires pour mener à bien sa mission. Tout en s'inscrivant dans le cadre juridique de l'UNESCO, l'IIPE est doté de ses propres statuts et d'un conseil d'administration pour guider ses politiques, ses programmes et son budget. 

Au fur et à mesure que l'Institut s'établit, la planification de l'éducation continue à se développer et à évoluer. Sa nature interdisciplinaire devient également plus évidente, et les économistes, les sociologues, les psychologues et les politologues apportent tous des contributions importantes. Dans les années 1970, la planification de l'éducation inclut la planification régionale, la microplanification et la carte scolaire, ainsi que les formes alternatives d'enseignement. 

En savoir plus sur l'histoire de l'IIPE (en anglais).

Un institut multi-facettes, une approche intégrée

Dès le départ, la mission de l'IIPE se concentre sur le renforcement des capacités des États membres de l'UNESCO et sur la production de connaissances en planification de l'éducation. S'appuyant sur ses deux fonctions historiques de formation et de recherche, l'IIPE s’engage dans des activités opérationnelles de coopération technique au milieu des années 1990. Ce dispositif de soutien dans les pays n’a cessé de se développer depuis.

Au fil du temps, l'IIPE développe également son rôle de catalyseur de la transformation de l'éducation, en encourageant et en facilitant la diffusion de ressources et d’informations auprès des États membres.

La combinaison de formation, d’activités de recherche et de développement, de coopération technique et de partage de ressources et de connaissances constitue non seulement l'identité de l'Institut, mais aussi ce qui le rend unique. Aujourd'hui encore, l'IIPE s'appuie sur ces quatre piliers complémentaires, qui se nourrissent mutuellement.

L'expansion de l'Institut est aussi géographique, avec l'établissement de deux bureaux régionaux à Buenos Aires, en Argentine (1998), et à Dakar, au Sénégal (2013).

 

En 1995, l'IIPE contribue également à la création du Réseau asiatique des institutions de formation et de recherche en planification de l'éducation (ANTRIEP), un réseau régional visant à créer des synergies entre 22 d'institutions. De même, l'IIPE soutient la création du Centre régional pour la planification de l'éducation (RCEP) en 2001 afin de renforcer et soutenir les systèmes éducatifs dans la région arabe par le biais de formations, de conseil et de diffusion de connaissances.

Un nouvel appel à la transformation

En 1963, l’IIPE est créé en grande partie en réaction à un contexte mondial. Soixante ans plus tard, le rôle transformateur de l'éducation est à nouveau au premier plan de l'agenda international, avec de nouveaux appels à la mobilisation des gouvernements et la création de solutions innovantes pour surmonter la crise mondiale de l'apprentissage, ainsi que les autres défis du moment. 

Six décennies plus tard, la planification reste plus que jamais pertinente pour favoriser la résilience climatique des systèmes éducatif, éliminer les disparités et créer des systèmes éducatifs solides, durables et équitables, prêts pour l'avenir. 

« La planification de l’éducation se préoccupe de l’avenir, à la lumière des enseignements qu’elle tire du passé ».
Philip H. Coombs, Qu'est-ce que la planification de l'éducation ? (1970)

Comme l'a bien résumé le premier directeur de l'IIPE, Philip H. Coombs, la planification de l'éducation est un « tremplin pour les décisions et les actions futures ... la planification est un processus continu, qui se demande non seulement où aller mais comment y parvenir et quel est le meilleur chemin. »

Philip H. Coombs, directeur fondateur de l'IIPE-UNESCO

Directeur fondateur de l'IIPE-UNESCO, Philip H. Coombs (1915-2006) est une figure pionnière de la planification de l'éducation. Avant de devenir le premier directeur de l'IIPE, M. Coombs est nommé premier secrétaire d'État aux affaires éducatives et culturelles par le président des États-Unis John F. Kennedy en 1961. Avant cela, il est à partir de 1952 le directeur de la recherche du Fonds pour l'avancement de l'éducation de la Fondation Ford.

En tant que premier directeur de l'IIPE, il assure l'avenir financier de l'Institut et lance le Programme de formation approfondie de l'IIPE, qui reste un projet phare de l'Institut pendant plus d'un demi-siècle. Il demeure une figure de proue de la réflexion sur l'éducation et la pauvreté rurale dans les pays en développement. Il mène à bien un large éventail de projets de recherche, et le séminaire sur les aspects qualitatifs de la planification de l'éducation donne lieu à une publication de référence, sous la direction de C.E. Beeby. Son travail, La Crise mondiale de l’éducation : analyse de systèmes, est publié en huit langues. 

Rétrospective : ils et elle ont dirigé l’IIPE-UNESCO depuis 1963

  • Martín Benavides (Pérou), 2023-present
  • Karen Mundy (Canada), 2021-2022
  • Suzanne Grant Lewis (États-Unis), 2014-2021
  • Khalil Mahshi,(Palestine) 2010-2014
  • Mark Bray (Royaume-Uni), 2006-2010
  • Gudmund Hernes (Norvège), 1999-2006
  • Jacques Hallak (France) : 1988-1998
  • Sylvain Lourié (France) 1982-1988
  • Michel Debeauvais (France) 1977-1982
  • Hans N. Weiler (États-Unis) 1974-1977
  • Raymond Poignant (France) 1969-1974
  • Philip H. Coombs (États-Unis), 1963-1968
IIEP Research Seminar 1964 in Bellagio, ItalyClass of 1970 of the IIEP Advanced Training Programme
Séminaire de recherche de l’IIPE en 1964 à Bellagio, en ItaliePromotion 1970 du Programme de formation approfondie de l’IIPE
The new IIEP-UNESCO headquarters building, rue Eugène Delacroix, Paris, 1973Workshop in the Philippines on institutional management of higher education, 1998
Le nouveau bâtiment du siège de l’IIPE-UNESCO, rue Eugène-Delacroix à Paris, en 1973Atelier aux Philippines sur la gestion institutionnelle de l’enseignement supérieur, en 1998